Toute l’intelligence du monde est impuissante contre une idiotie à la mode. Anonyme
Nick van Woerth, Spitting Image, 2009, plaster bust, paper spitwads and glue, 34x18x12 cm
Moi, je suis ailleurs. Je ne suis pas acteur. Je suis dans la vie. Je fais mon boulot, je suis payé, je m’amuse. Toujours. Je n’ai jamais fait ce métier par vocation. Ma vocation, c’est aventurier. Explorateur de l’existence. C’est ce qui me rend libre. Je l’ai toujours eue en moi. Mais cela ne s’apprend pas. Je pense chaque fois à Picasso. Son génie n’est pas dans la maîtrise de son art, ni même dans sa connaissance, mais dans sa capacité à voler les choses de la vie, qu’il savait déchiffrer avant tout le monde. Voilà un grand aventurier de la vie. Moi, j’ai fait ce que j’ai pu. Ce dont je me suis rendu compte très tôt, c’est que je ne pouvais pas faire les choses seul. D’où mon désir de rencontres. J’ai longtemps été complexé par le manque d’éducation scolaire, que je ne confonds pas avec le manque de savoir.
Sam Jinks, Untitled, 2007, silicon, paint & human hair.
Et il m’a fallu du temps pour réaliser la chance que j’avais, en fait. Je suis comme tous les mecs qui n’ont pas été à l’école, j’aime lire et j’aime apprendre. Oui, une grosse éponge. Il n’y a aucun problème. Je préfère être une grosse éponge qu’un pète-sec sans âme. C’est toujours excitant de regarder ce qui se passe autour de soi et comment les choses bougent. Tout se transforme, rien n’est figé. Ce à quoi il faut faire attention, c’est l’uniformisation. En tout. (…) Ce qui est important, c’est la façon dont tu te traites, toi. Oui, si on est suffisamment libre pour savoir ce que l’on veut. Les artistes sont des gens étranges. Pas faciles à vivre. Mais j’ai une grande admiration pour eux.
Ron Mueck, Untitled (Big Man), 2000, mixed media, modif AL.
Moi, comme je viens de nulle part, j’ai toujours eu la chance d’avoir une sortie de secours dans la tête. Étant livré à moi-même très tôt, j’ai développé un instinct qui m’a permis de savoir avec qui avancer. Et vers où. Jamais. Surtout pas de contrainte. Aujourd’hui, je ne sais pas trop. Mais un type comme Marcel Duchamp, par exemple, dérangeait. Il a réalisé 47 tableaux, qui étaient en fait 47 idées. Chaque fois, il se pose une question. Quant à la politique, elle me semble trop perverse. Pas honnête, en tout cas. Je ne m’en mêle pas, elle ne m’intéresse pas.
Patricia Piccinini, The Young Family, 2002-3, silicone, acrylic, human hair, leather, timber, 80 x 150 x 110 cm (irreg.)
Je ne sais même pas si je suis français. Je me sens davantage citoyen du monde. (…) je n’ai qu’une envie : regarder les gens simplement, à hauteur d’homme. Ce qui est terrible actuellement, c’est cette assurance qu’apporte la technique. Le beau, c’est quand rien n’est sûr. Et quand rien n’est sûr, il faut faire un effort sur soi pour arriver à quelque chose. Je ne me pose pas la question. Le bonheur et le malheur deviennent vite des obsessions si tu y penses. Il vaut mieux avancer. Et garder son jardin secret. (…suite interview) par Éric Libiot de Gérard Depardieu
Références :
Münch Mammuth