Rite…

22 décembre 2010 par AL Laisser une réponse »

Je pense que vous devriez rêver la terre. Davi Kopenawwa, chaman et le porte-parole des Yanomami


Bonobo, Kanzi, 2008, Vincent j. Musi for National Geographic Magazine.

« C’est Omama qui nous a créés, mais c’est aussi lui qui a fait venir les Blancs à l’existence. Il n’y a qu’un seul et même ciel au-dessus de nous. Il n’y a qu’un seul soleil, qu’une seule lune. Nous habitons sur la même terre. Les Blancs n’ont pas été créés par leurs gouvernements. Ils viennent de la fabrique d’Omama ! Ils sont, autant que nous, ses fils et ses gendres. Il les a créés il y a très longtemps à partir de l’écume du sang de nos ancêtres, les habitants de Hayowari. (…)
Nous, Yanomami, lorsque nous voulons connaître les choses, nous nous efforçons de les voir en rêvant. C’est là notre manière d’étudier, je l’ai dit. C’est donc en suivant cet usage que, moi aussi, j’ai appris à voir. Mes anciens ne se sont pas contentés de me faire répéter leurs paroles ! Ils m’ont fait boire la yâkoana et m’ont permis d’admirer moi-même la danse des esprits durant le temps du rêve. Ils m’ont donné leurs propres xapiri et m’ont dit :  » Regarde ! Contemple la beauté des esprits ! Lorsque nous serons morts, tu continueras à les faire descendre après nous. Sans eux, ta pensée cherchera en vain à comprendre les choses. Elle restera dans l’obscurité et l’oubli !  » C’est ainsi qu’ils m’ont ouvert leurs chemins et ont fait croître ma pensée. À présent, je vais vieillir et m’efforcer de transmettre à mon tour ces paroles aux jeunes gens afin qu’elles ne se perdent pas et ne soient jamais oubliées. (…) »


With the forceful blow the powder entered the nose, Psychedelics Encyclopedia, page 321, Peter Stafford. 1993

« Telle est la beauté des xapiri que les anciens ont connue avant nous ! C’est ainsi que, depuis le premier temps, ils font entendre leurs chants et dansent pour se présenter ! » Ces images reviennent sans cesse dans notre pensée et restent tou­jours aussi nettes. Les paroles des esprits qui les accompagnent demeurent aussi à l’intérieur de nous. Elles ne se perdent jamais. C’est notre historique. C’est à partir d’elles que nous pouvons penser avec droiture. C’est pourquoi je dis que notre pensée est semblable aux peaux d’images sur lesquelles les Blancs conservent les dessins des discours de leurs anciens…

Ces paroles venues de la valeur de rêve des esprits, nous les fai­sons ensuite entendre aux gens de notre maison. Nous ne les trompons pas comme l’ont fait, autrefois, les gens de Teosi en nous répétant : « Sesusi va descendre dans la forêt ! S’il le veut, aujourd’hui ou demain, il arrivera parmi nous ! » Pourtant, le temps a passé et il ne s’est rien produit. Nous chamans, nous ne parlons jamais de la sorte ! Nous n’abusons jamais les nôtres en regardant des dessins de mots pour pouvoir parler. Nul besoin de fixer nos yeux sur des peaux de papier pour nous souvenir des paroles des xapiri ! Elles sont collées à notre pensée et se pressent à nos lèvres, innombrables, aussitôt que nous devenons esprits nous-mêmes. C’est de cette manière qu’il nous est possible de les révéler si facilement à ceux qui nous écoutent. Ce sont ces paroles sur les choses que j’ai vues en rêve que j’essaie d’expliquer aux Blancs pour défendre la forêt. Si je ne possédais pas de maison d’esprits et si j’étais incapable de voir quoi que ce soit, je n’aurais rien à leur dire. Mes yeux feraient peine à voir, ma voix serait hésitante et ils se rendraient vite compte que l’ignorance et la peur engourdissent ma bouche. » (Suite de l’article ) David Kopenawwa.


James Mollison, James and other Apes, Inge, 2002, Lambda print, 164 x 120 cm.

Coca, datura, tabac, peyotl ou Salvia divinorium, la liste des plantes « chamaniques » récupérées par les Occidentaux est longue. Et chaque fois leur intégration a été accompagnée d’un processus identique d’acculturation. Dépouillées de leur gangue rituelle, elles ont toutes pris le statut, un peu vil, de drogues dures. Toutes ? Non, une plante échappe à la règle : l’ayahuasca. Elle est passée d’une culture à l’autre en conservant son cortège de rites. Une observation qui, si elle surprend l’Occidental, ferait sourire un Amérindien. Et pour cause, dans la tradition amazonienne, cette plante est celle qui enseigne aux hommes. (… suite de l’article) La plante qui enseigne le sacré, Viviane Thivent, Frédérick Bois-Mariage, La recherche.

Oui, c’est un vrai phénomène de société qui est bon a penser. Christian Ghasarian.

Références:
Rite
Bufoténine
Des plantes psychotropes, Sébastien Baud (CRESS) et Christian Ghasarian (CNRS), émission audio France culture.
Editions Imago
Julien Bonhomme

Publicité

Les commentaires sont fermés.