Archive pour le ‘Peinture’ catégorie

Timewave…

22 juillet 2011

Pour moi le tableau est la personne. Lucian Freud


«Autoportrait avec un oeil au beurre noir» de Lucian Freud, janvier 2010, Londres. AFP

Je veux que la peinture soit chair. Je peins ce que je vois, pas ce que vous souhaitez que je voie. Je travaille à partir de personnes qui m’intéressent, auxquelles je suis attaché et auxquelles je pense, à l’intérieur de pièces où je vis et que je connais. L’effet que les modèles créent dans l’espace est tout aussi étroitement lié à eux que pourraient l’être la couleur de leur peau ou leur odeur. Lucian Freud

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I’m Still Here – The Lost Year of Joaquin Phoenix, réalisé par Casey Affleck, documentaire 2010

Il s’agit clairement d’une double crise: de conscience et de conditionnement. Ce sont là deux choses que les psychédéliques ébranlent. Nous avons la puissance technologique, les compétences requises en ingéniérie qui nous permettraient de sauver notre planète, de vaincre la maladie, de nourrir ceux qui ont faim, d’éradiquer la guerre; Mais nous manquons d’une vision intellectuelle, de la capacité de transformer nos esprits. Nous devons nous déconditionner de 10.000 ans de comportements médiocres. Et ce n’est pas facile. Terence McKenna, « This World…and Its Double »

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Grobman by Kollektiv Group, 13 August – 17 July 2010, Acrylic & fluorescent colors on canvas. Curator: Rufina Valsky, Kishon gallery

Sentant l’angoisse monter, je décidais de garder les yeux ouverts pour échapper un moment au maelström des visions. Mon corps était parcouru de sensations organiques des plus étranges, mais je savais que c’était le signe de l’ivresse. Tétanisé, je m’obstinais à garder les yeux ouverts et à contempler le ciel étoilé. Soudain le ciel nocturne me paraissait agité par des mouvements étranges.

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Jake & Dinos Chapman, 15 Jul—17 Sep 2011, white cube, london

C’est à ce moment que se produisit un phénomène incroyable. Une des étoiles de la Voile Lactée semblait descendre lentement au coeur de la forêt à quelques mètres au-dessus de moi. Je décidais de me relever pour m’asseoir. En basculant sur mon côté droit, je perçois cette étoile comme suspendue à un fil de lumière qui la relie à la voûte céleste. Cette vision me fait penser aux images en trois dimensions que l’on voit parfois au cinéma et qui semblent sortir de l’écran pour s’avancer vers vous. L’angoisse me rattrape.

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Jake & Dinos Chapman, 15 Jul—17 Sep 2011, white cube, london

J’ai l’impression d’être trompé, des questions stridentes assaillent ma pensée. La réalité est-elle un mensonge? Tout n’est-il qu’illusion. Romuald Leterrier « La Danse du Serpent ».

Références:
Zoya Cherkassky blog
Ovnis-usa
Jose Francisco Salgado
Stephane Guisard

Délok…

14 juin 2011

L’homme mérite qu’il se soucie de lui-même car il porte dans son âme les germes de son devenir. Carl Gustav Jung

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Ryan Mc Lennan, Monument, 2009, Acrylic and graphite on paper, 52 x 39 in.

Dans la vie, nous subissons une quantité de contraintes opprimantes qui se bousculent de telle sorte que l’on ne trouve plus le temps – en face de toutes ces « données » – de se demander qui les a au fond « données ». C’est de ces données que se libère le défunt, et l’enseignement a pour but d’appuyer sa libération.

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Ang Tsherin Sherpa, Staying alive – Too sexy to die, 2011, 48″x 36″, Acrylic and silver leaf on wood.

Si nous nous mettons nous-mêmes à la place du défunt, nous tirons autant de profit de l’enseignement, en apprenant dès le premier paragraphe que le donateur de toutes ces « données » nous habite nous-mêmes – vérité que l’on ne sait jamais, malgré toute son évidence dans les choses les plus grandes comme dans les plus petites, alors qu’il serait si souvent utile, voire indispensable, de la connaître.

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Seungyea Park, Monster, 2011, mixed Media, paper, 150 x 130 cm, Seoul.

Il est vrai qu’une telle science n’est bonne que pour les caractères méditatifs qui aspirent à comprendre ce qu’ils vivent, pour une sorte de gnostiques par tempérament, qui croient en un sauveur appelé – comme celui des Mandéens – « connaissance de la vie » (Manda d’Hayyê). Il n’est peut-être pas donné à un très grand nombre de voir le monde comme une « donnée ».

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Seungyea Park, Blind me not, 2011, mixed Media, paper, 150 x 130 cm, Seoul.

Il faut sans doute accomplir une grande conversion, qui exige beaucoup de sacrifices, pour voir de quelle manière le monde est « donné » par l’essence de l’âme. C’est tellement plus immédiat, plus frappant, plus impressionnant et partant plus convaincant de considérer de quelle manière cela m’arrive, au lieu d’observer comment je le produis.

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Kris Kuksi, Gemini, 2007, Mixed media assemblage, 33 x 33 x 7 in.

L’essence animale de l’homme répugne même à se concevoir comme l’auteur de ses données. C’est pourquoi des tentatives de cet ordre ont toujours été l’objet d’initiations secrètes comprenant en règle générale une mort figurée, laquelle symbolisait le caractère total de la conversion. Commentaire psychologique de Carl Gustav Jung, traduction Marguerite La Fuente, préface Jacques Bacot, Editions A. Maisonneuve, Paris, 1933.

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Ang Tsherin Sherpa, Cosmic Mandala, 2006, Ground Pigment and Gold on Cotton, 17″ x 17″.

L’extase et la peur. Les visions sont comme une toile tendue que l’on traverse sans cesse. L’extase ? Les crocodiles bijoux, à peine saisis par le mental, se retournent et deviennent d’immondes grouillements d’araignées. Se rendre à la peur. Ne pas la saisir. Se laisser traverser dans un frisson par elle reconnecte l’esprit et le corps, faisant jaillir de magnifiques visions, les deux faces. Je n’ai encore jamais vraiment réussi à traduire avec la pellicule ce passage d’un univers vers un autre. (…)

Sinon, je ne bouge pas de la nuit. Je ne bouge pas d’un petit doigt. Je ne tremble pas, recroquevillé telle une momie inca. Des êtres obscurs dansent autour de moi. Jan Kounen, Carnets de voyages intérieurs Ayahuasca medicina, Un manuel

Références:
Bardo Thödol
Thangka Art
Joshua Liner gallery

L’ennemi…

4 avril 2011

Parce que ce dont on ne se souvient pas, révèle ce qu’on ne peut oublier. Alejandro González Iñárritu à Maria Eladia


Spinning Thread on Bare Knee, old witch doctor, Skenna River Indians. Between ca. 1900 and ca. 1930.

(suite article…) Maintenant, il y a deux mondes à l’intérieur de ma tête, et ils peuvent se parler. Ils ne sont plus séparés. Ensemble, ils forment un monde plus grand. Ce n’est pas de la schizophrénie, mais du bilinguisme, du bi-cognitivisme. Maintenant que je dispose d’un autre angle, je vois plus de sens dans le monde, et également plus de mystère. Jeremy Narby

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Nomads of western Tibet: the survival of a way of life Par Melvyn C. Goldstein, Cynthia M. Beall

L’artiste peintre, l’écrivain, le compositeur, le penseur, l’homme de dieu, l’homme de Néandertal, le philosophe, l’homme de science tel que Einstein, Nobel et tous ceux qui ont marqué leur siècles et les siècles, je les considère comme des îles à eux seuls, produits de dégazage d’une pensée Humaine volcanique qui s’est solidifiée. Tels des planètes, des astres, des nébuleuses qui gravitent dans le cosmos de l’Humanité. (…suite article) L’art et la culture par Malek Gouni.

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Le Japon dévasté, le 13 mars 2011. Photo Dylan McCord.

    Ma jeunesse ne fut qu’un ténébreux orage,
    Traversé çà et là par de brillants soleils;
    Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage,
    Qu’il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils.

    Voilà que j’ai touché l’automne des idées,
    Et qu’il faut employer la pelle et les râteaux
    Pour rassembler à neuf les terres inondées,
    Où l’eau creuse des trous grands comme des tombeaux.

    Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve
    Trouveront dans ce sol lavé comme une grève
    Le mystique aliment qui ferait leur vigueur ?

    - O douleur! ô douleur! Le Temps mange la vie,
    Et l’obscur Ennemi qui nous ronge le cœur
    Du sang que nous perdons croît et se fortifie !

    Charles Baudelaire

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Félicien Rops, Pornokratès ou « la dame au cochon », 1896, crayon et aquarelle sur papier, 70 × 45 cm.

Certains voient en ce cochon à la queue dorée l’image de la luxure et du lucre pilotant la femme, qui n’a pour seule excuse que son aveuglement; d’autres y perçoivent l’image de l’homme, bestial et stupide, mené en laisse par la femme. Cette image du cochon, comme celle du pantin ou du pierrot, est partagée par bien des contemporains de Rops. Avec Pornokrates, nous assistons à l’avènement en art d’une femme contemporaine, arrogante, parée, impitoyable que glorifie Rops. Textes: B. Bonnier, N. Malinconi, V. Carpiaux

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Félicien Rops, Pornokratès ou « la dame au cochon », 1896, crayon.

Ma Pornocratie est faite. Ce dessin me ravit. Je voudrais te faire voir cette belle fille nue chaussée, gantée et coiffée de noir, soie, peau et velours, et, les yeux bandés, se promenant sur une frise de marbre, conduite par un cochon à « queue d’or » à travers un ciel bleu. Trois amours – les amours anciens – disparaissent en pleurant (…) J’ai fait cela en quatre jours dans un salon de satin bleu, dans un appartement surchauffé, plein d’odeurs, où l’opopanax et le cyclamen me donnaient une petite fièvre salutaire à la production et même à la reproduction. Lettre de Félicien Rops à H. Liesse, 1879.

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Félicien Rops, L’initiation sentimentale, 1887, crayon et aquarelle sur papier H. 29,2 ; L. 18,2 cm, musée d’Orsay.

Je tâche tout bêtement et tout simplement de rendre ce que je sens avec mes nerfs et ce que je vois avec mes yeux, c’est là toute ma théorie artistique. J’ai encore un autre entêtement, c’est celui de vouloir peindre des scènes et des types de ce XIXe siècle, que je trouve très curieux et très intéressant; les femmes y sont aussi belles qu’à n’importe quelle époque, et les hommes sont toujours les mêmes. De plus, l’amour des jouissances brutales, les préoccupations d’argent, les intérêts mesquins, ont collé sur la plupart des faces de nos contemporains un masque sinistre où l’instinct de la perversité, dont parle Edgar Poe, se lit en lettres majuscules; tout cela me semble assez amusant et assez caractérisé pour que les artistes de bonne volonté tâchent de rendre la physionomie de leur temps. Félicien Rops

Références:
Library of congress
Slate
Hôpital Marmottan
Psychanalyse dans tous ses états, Malek Gouni, blog médiapart.
Musée Rops

Ukiyo-e…

19 mars 2011

Il y a trois bombes. La bombe atomique, la bombe démographique et la bombe de l’information. Albert Einstein

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Hokusai Katsushika, La Grande Vague de Kanagawa (1831), première des 46 estampes composant les 36 vues du mont Fuji.

Le temps déferle littéralement sur nos têtes. Nous en concevons une obscure inquiétude. A rester trop immobiles dans nos convictions, pensons-nous, nous risquerions de manquer quelque chose de la course du monde. La religion de la vitesse qui nous assiège transporte avec elle un « trop-plein » de réel. Pour éviter d’être submergé nous n’avons d’autre recours que de nous dépêcher toujours plus. Nous finissons par faire de la vitesse elle-même le symbole de l’innovation, de la réussite et du bonheur humain. (…suite article) Paul Virilio, Le critique de la vitesse, Nouvel obs, 18/08/10.

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Gisela & Manfred Delpho, A « Royal Fisher » at the winter hunt, Flying up.

(…) La nature favorise l’expertise locale. Conséquemment, les espèces s’adaptent graduellement et définissent leurs spécialités, les niches dans lesquelles elles peuvent le mieux se tirer d’affaire. Si les ressources étaient abondantes dans les forêts tropicales, ces spécialistes n’existeraient pas. Les espèces qui croissent plus vite en consommant plus de ressources les domineraient rapidement et la forêt serait peuplée de quelques ilôts de monoculture. Les limites sont, en fait, la source des innovations dans la nature. Chaque stade de développement atteint sa limite, laissant place à la créativité. Si une innovation est adéquate pour relever le défi des limites, l’écosystème en tire profit. (…suite article), Biomimétisme, Encyclopédie de l’agora, 11/02/06.

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Gisela & Manfred Delpho, A « Royal Fisher » at the winter hunt, Noisedive.

Il faut y voir la métaphore d’une espèce de folie anthropologique. Le monde n’est plus qu’un perpétuel empressement. On assiste, écrit Virilio, à la « conjonction de plus en plus forte, étendue à l’ensemble de l’espèce humaine, entre les deux séries de phénomènes : des transmissions d’informations, à la vitesse de la lumière, et des transports réels . (…suite article) Paul Virilio, Le critique de la vitesse, Nouvel obs, 18/08/10.

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Olaf Brzeski, Dream – Spontaneous Combustion, 2008, resin, soot, approx. 175 cm h, East International, Norwich.

L’accident ici nous dépasse. Nous assistons à ce que j’appelle des événements « révélationnaires » : ils révèlent ce que nous ne maîtrisons pas. La notion de progrès sert à nier cela, puisque dire « progrès » c’est dire que c’est mieux. Or, la réussite devient catastrophique, c’est inouï. (…suite article) Paul Virilio, Notre puissance se retourne contre nous, Science et avenir, 17/03/11.

La nature est un professeur, pas un fournisseur et le biomimétisme commence en sortant de chez soi, avec la capacité à observer et à s’émerveiller ! , Janine Benyus.

Références:
Ukiyo-e
Biomimétisme
Ask nature
Biomimicry institute
Czarna galeria
Musée des accidents
Tour du monde en 80 hommes

Agapē…

2 mars 2011

Le bonheur c’est lorsque vos actes sont en accord avec vos paroles. Gandhi

nullAlexandre Farto

Les prophètes décrivent leur vision comme quelque chose de bien réel, qu’ils ont vu avec leur oeil immortel; il en est de même des apôtres, l’oeil de lumière perçoit distinctement les objets. Un Esprit, une vision ne sont pas, contrairement à ce qu’en pense la philosophie moderne, des phénomènes nébuleux, ou du néant : ce sont des phénomènes qui procèdent d’un degré d’organisation dépassant infiniment les pouvoirs de la nature mortelle. Celui qui ne «voit» pas plus distinctement, plus clairement, plus fortement et plus lumineusement qu’avec son oeil mortel, celui là ne «voit» pas. William Blake

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Alexandre Farto

Le champignon, comme toutes les substances psychédéliques naturelles, nous permet de voir, plus fortement et plus lumineusement qu’avec notre oeil mortel, bien au delà des horizons de cette vie passagère; il nous permet de voyager dans le temps, de traverser d’autres niveaux de réalité, de connaître d’autres plans d’existence, comme disent les Indiens, il permet de voir dieu. Quoi d’étonnant à ce que les participants se sentent indissolublement lies à l’agape ? Quoi d’étonnant à ce que la personnalité soit éclipsée, dès lors que le corps et l’esprit sont restaurés dans un état natif! Tout ce que l’on voit cette nuit là baigne dans la clarté de l’origine : le paysage, les maisons, les ustensiles quotidiens, les animaux, tout est calmement irradié par la lumière primordiale; on dirait que les choses viennent juste d’être fabriquées par le Créateur!

Erik Johansson, Gå din egen väg

Cette totale nouveauté — on dirait l’aube de la création — vous submerge et vous enveloppe, vous dissout dans sa beauté inexprimable. Et, naturellement, vous avez le sentiment d’être pris dans un événement, de participer d’une dimension qui transcendent infiniment le traintrain de la vie quotidienne. Ici et maintenant, je vois pour la première fois, je vois directement, sans l’aide des yeux mortels. Et pendant tout le temps que vous « voyez ». la prêtresse chante, elle ne chante pas fort, mais avec autorité. Les Indiens n’ont pas l’habitude de manifester leurs états intérieurs, sauf en des occasions comme celle ci.


William Blake, The Great Red Dragon and the Woman Clothed with the Sun, pen and watercolour, 435 x 345 mm, 1805

Platon nous dit qu’au delà des apparences éphémères de ce monde illusoire, il y a un monde idéal, le monde des Idées, où les choses existent avec leur visage originel, dans leur forme éternelle. Pendant deux millénaires, les philosophes se sont acharnés à peser et à discuter sa «théorie». D’où Platon tire-t-il ses conceptions ? Pour moi, la chose est claire, comme elle l’était aussi pour ses contemporains. Platon avait bu le breuvage à Eleusis et il avait eu la Vision cette nuit-là. D’après l’article « Le champignon divin de l’immortalité » sur R. Gordon Wasson.


Ex drummer réalisé par Koen Mortier 2007, 104 minutes.

Il y a assez de tout dans le monde pour satisfaire aux besoins de l’homme, mais pas assez pour assouvir son avidité. Gandhi